Hop, ça y est, le gros événement est passé. La Ferrari 330 LM/250 GTO n°3765 LM a changé de main aux enchères. Pour 47 millions d’euros (en fait $51 705 000, soit 47 633 748,30 €, dont un bon 4,5 millions de dollars pour la maison d’enchères, RM Sotheby’s). 47. Millions. Bref. C’est beaucoup ! Par exemple, ça permet d’acheter 639 Alpine A 110 S sans options, et avoir de la monnaie en plus.
Bon, maintenant que l’info est passée, on peut discuter de l’auto en question, 3765 donc (oui dans le monde des autos de collection très chères on désigne les voitures par leur numéro de châssis, c’est comme ça) : elle est unique, même parmi les 39 Ferrari 250 GTO fabriquées, qui le sont pourtant toutes, à peu de choses près.
La Ferrari 250 GTO : une 250 SWB en mieux ?
La 250 GTO est une évolution de la 250 GT Berlinetta SWB, pour Short Wheel Base, ou châssis court en français, ou passo corto en italien (ou en snob si vous n’êtes pas italien), qui a déjà acquis un sérieux palmarès en course, genre trois victoires consécutives au Mans en 59, 60 et 61. En gros, la GTO est plus légère avec seulement 900 kg (plus ou moins 30 selon les versions), plus puissante avec 300 chevaux, plus rigide, avec un centre de gravité plus bas grâce au moteur désormais à carter sec, et la boîte de vitesses offre 5 rapports, soit 25 % de plus que la SWB.
Plus rare qu’une Ferrari 250 GTO
La 250 GTO a été produite à 39 exemplaires en tout. Sur ces 39, il y a 35 1962/63, dites Tipo 62, et 4 « séries 2 », fabriquées en 1964 (et moins jolies). De plus, il y a quatre Ferrari 250 GTO Tipo 62 qui ont été converties en série 2. Ce qui nous laisse avec 31 Tipo 62. Sur ces 31, trois ont eu droit à un moteur de 4 litres, et on les appelle de façon familière « 330 GTO ». Et là, si vous êtes perspicace (et que vous savez lire un titre), vous avez déjà deviné : 3765 est un de ces trois exemplaires. Et même plus, elle est née avec ce moteur 4 litres, et c’est la seule dans ce cas-là. Avec ce moteur, elle perd son homologation et court donc en catégorie prototypes, d’où le 330 LM (son nom officiel alors).
Historique : c’est compliqué (mais très bien suivi, heureusement)
Elle a commencé sa carrière en course en mai 1962, avec une deuxième place aux 1 000 km du Nürburgring. Par la suite elle va gagner 90 chevaux et courir au Mans en juin, avec une surchauffe à la clé. Enfin, elle récupèrera un moteur de 250 P de 3 litres, récupérant donc son homologation, d’où son nom de 330 LM/ 250 GTO : 330 LM au début, 250 GTO par la suite. Après, elle sera revendue à des privés, qui courront avec en course de côte. Elle va également gagner moult concours d’élégance.
C’est l’unique Ferrari 250 GTO 1962/63 à avoir été engagée par la Scuderia Ferrari et pas par une équipe privée.
Un rapport prix/cheval pas ouf, comme qui dirait
Bref, 3765 est unique parmi les GTO, avec un pedigree sympa, même si limité en volume, un historique connu et documenté, la plus belle carrosserie (j’aime moins les 64, mais c’est personnel)… C’est donc une Ferrari 250 GTO des plus désirables, même si certains diront que les plus « pures » sont celles qui ont conservé leur moteur d’origine, ça se discute. On était donc en droit de s’attendre à une somme assez énorme et on y est. D’ailleurs, RM avait communiqué sur une estimation de plus de 60 millions hors frais, mais ça c’était plus du marketing qu’autre chose (on est à circa 45 millions hors frais). Ça en fait quand même la Ferrari la plus chère jamais vendue aux enchères, et la deuxième voiture la plus chère jamais vendue aux enchères.
La merveilleuse vie des riches
Alors, c’est beaucoup comment ? Évidemment, c’est une somme quasi-inimaginable pour une bagnole. Mais une Ferrari 250 GTO c’est plus qu’une bagnole : voyez ça comme une œuvre d’art, sauf qu’on peut rouler très vite dedans. Alors qu’un Van Gogh, on peut seulement se rouler un gros blunt dedans (ne faites pas ça). Après, le prix d’une GTO, ça impressionne toujours, mais les gens qui ont de quoi payer ce genre de somme pour une voiture sont très au courant des prix, et surtout du potentiel investissement que ladite voiture représente. Comme l’aurait dit JP Morgan à propos du prix des trucs de riches : « If you have to ask how much it costs, you can’t afford it » (si vous devez demander le prix, c’est que c’est trop cher pour vous).
La voiture la plus chère du monde, ou pas
Les dernières Ferrari 250 GTO vendues aux enchères ont également fait de très beaux scores : 38 millions de dollars en 2014, puis 48,4 millions de dollars en 2018. Entre temps, toujours en 2018, un exemplaire a changé de main de gré à gré, pour une somme donc inconnue, mais vraisemblablement entre 70 et 80 millions de dollars (beaucoup de gens dans la confidence des milieux autorisés du cénacle du secret des dieux parlent de 72 millions). Ce qui est beaucoup. Mais le record d’une automobile aux enchères revient tout de même à la patronne, la Mercedes 300 SLR coupé Uhlenhaut, toujours chez RM, pour la somme délirante de 135 millions d’euros, en mai 2022. Et évidemment, on cause toujours de la Bugatti 41 Royale, qu’on ne verra pas en vente avant un bon moment. La dernière fois qu’une a changé de mains aux enchères, c’était en… 1987 !
Des belles photos de Ferrari 250 GTO
Crédits photos : RM Sotheby’s et Barchetta CC