Ce Dacia Duster 4×4 diesel de 115 ch performe sur les terrains dégradés et boueux mais est-ce pour autant suffisant ? Que vaut-il dans un quotidien francilien bitumé et embouteillé ? Fait-il le poids par rapport à la seconde meilleure voiture du monde, la Dacia Sandero Stepway 110 ch ? Est-ce que Dacia est encore une marque low-cost ? Beaucoup de questions et beaucoup de réponses dans cet essai.
Le contexte de l’essai
Les traditions ont du bon. Enfin, certaines traditions. Par exemple, celle qui consiste à faire courir un taureau dans une arène pour le mutiler et le tuer devant une foule en liesse n’a plus rien de bon. Un taureau, ça doit être dans un pré ou sur le capot d’une Lamborghini, c’est tout. Pourquoi je commence par un laïus antispéciste ? Parce qu’on va parler de la place de chacun dans ce papier. Particulièrement de la place d’un 4×4 diesel. Je m’engage sur un terrain glissant, littéralement comme durant notre sortie avec les frangins Diakov, ceux du patron d’Hoonited. Oui, en introduction, je parlais de cette tradition annuelle : tester des voitures tout-terrain à chaque fin d’année dans le fameux département de l’Yonne. Une seconde édition pour moi à leurs côtés après celle de 2022 en Suzuki Jimny.
Le quotidien en Dacia Duster 4×4
Avant de parler de cette sortie pluvieuse, on va commencer par le quotidien en Dacia Duster 4×4. Dès lors, il faut poser les bases, à savoir que nous n’avons pas tous le même quotidien. Le mien consiste à se taper des bouchons sur la Francilienne pour me rendre à mon bureau. Certes, les rues des villes sont défoncées et les dos d’âne plus fréquents qu’un acteur/réalisateur/producteur violeur dans le cinéma français mais en rien les 4 roues motrices n’aident dans ces situations. Donc finalement, qui a besoin d’un Dacia Duster 4×4 ? Ceux qui circulent dans les champs, dans les bois et sur les routes mouillées ou enneigées. On s’adresse clairement à une partie minime des conducteurs. Pour autant, heureusement que ces véhicules existent pour eux. Pour la grande majorité, c’est complètement inadapté.
L’horrible boîte ultra-courte
Je ne suis pas un expert du franchissement comme @JulienZlata (que je tanne depuis des mois pour nous écrire un papier Père Castor sur les Land Rover) mais je sais dorénavant qu’en plus d’avoir des roues motrices, un bon 4×4 se doit d’avoir une boîte de vitesses courte. C’est-à-dire qu’elle nécessite d’envoyer le maximum de couple pour avancer/sortir dans des conditions difficiles. Comme de la terre ou de la boue. Le plus souvent, les véhicules tout-terrain ont une double boîte. Une classique et une courte. Cela permet de passer de l’une à l’autre en fonction de la situation. Vous me voyez venir ? Ce Duster n’a qu’une seule boîte de vitesses. C’est tout son drame. Et le mien durant 6 jours.
Dès la première vitesse, on tape les 2 000 tours/min en moins d’une seconde et c’est quasiment la même chose si on démarre en deuxième. On est secoués par la montée rapide dans les tours puis par le creux juste avant de passer le rapport supérieur. Même en mode « éco », on perd de la puissance mais pas le mauvais étagement de la boîte.
Le mauvais étagement de la boîte et l’insonorisation
Si l’inconfort est valable à chaque montée de rapport, il l’est aussi à chaque rétrogradage. On se retrouve à nos débuts d’apprentis conducteurs à l’auto-école quand on débrayait incorrectement. Limite avec le nez dans le pare-brise tellement la boîte est étagée n’importe comment. Cela reste valable pour toutes les vitesses sauf la 6. Celle-ci pourrait s’enclencher à 80 km/h mais elle broute à la moindre inclinaison de la chaussée.
Par contre, à 130 km/h, on apprécie d’avoir cette 6ème vitesse pour amoindrir le bruit du moteur dans l’habitacle en stagnant à 2 700 tours/min sur autoroute. Rien d’insupportable mais la sono ne peut pas le recouvrir avec un son médiocre, genre premier prix. On notera que le fameux satellite Renault pour les commandes radio permet de couper le son mais pas de mettre en pause un podcast. La bonne surprise provient des bruits d’air : inexistants. C’est assez troublant car je m’attendais à bien plus vu le gabarit. Tout comme la Sandero Stepway, aucun problème de bruit de mobilier. Contrairement à chez Renault. À croire que l’assemblage est meilleur chez Dacia. Ou alors les matériaux sont plus basiques et plus efficaces.
La vie à bord du Dacia Duster 4×4
Ce Duster manque de luminosité dans l’habitacle du fait de l’absence d’un toit panoramique. Oui, j’ai trop des goûts de luxe sur ce point. Ce n’est pas au programme des options chez Dacia. L’ensemble de l’intérieur est composé de plastiques durs et bientôt vieillots. Contrairement à la Sandero Stepway qui ajoutait un peu de douceur visuelle avec de la feutrine et des inserts cuivrés. Là on reste dans l’austérité totale. On a l’impression d’une Dacia de 2018 et non de 2023.
L’alerte d’angle mort clignote en permanence sous la pluie avec probablement des capteurs qui s’emmêlent les pinceaux. Au moins, on peut la désactiver par une simple pression. Tout comme pour le réglage de la climatisation avec des gros boutons ronds bien ergonomiques. Android Auto fonctionne correctement malgré un écran bas de gamme. La mauvaise résolution et le temps de latence pour valider les sélections ramènent là aussi à 2018. Ou même 2008 quand on voit les caméras. Certes, elles sont 4 (multiview) et donnent une vision correcte lors des manœuvres. Pour autant, sans une bonne luminosité extérieure, on n’y voit pas grand-chose. Dernier élément, quand on sort de la voiture, elle grésille/bourdonne pendant 1 min avant de s’arrêter. Comme un signal radio déconnant. Cela donne une mauvaise image pour une marque qui gagne pourtant en qualité.
L’espace du Dacia Duster 4×4
Dans ce Duster, on ne manque pas de place ni d’espace. Je comprends totalement qu’on choisisse ce SUV lorsqu’on a des enfants. On dira ce que l’on veut mais on se casse moins le dos à installer des gamins à l’arrière quand la voiture est plus haute. Et on se cogne moins la tête. Je ne sais pas de quoi je parle mais je fais confiance à @LeStagiaire sur ce sujet.
Autrement, je vous rappelle que pour sauver la planète, il faut arrêter de faire des enfants. Et pour sauver votre dos, il faut continuer l’exercice physique. Puis manger des fruits et des légumes (de saison) car c’est bon les fruits et les légumes. Sauf les choux de Bruxelles. Mieux vaut manger des bonnes frites belges (pléonasme). Bon écoutez, je me suis fait assez chier avec cette boîte courte durant l’essai donc je peux quand même me faire plaisir durant la rédaction de cet article.
Les sièges, le coffre et la conduite
Les sièges sont relativement confortables, aucun reproche à ce niveau et même agréable au toucher. Ils ont aussi la bonne idée d’être chauffants. Avec un seul niveau d’intensité mais un niveau efficace. Le coffre de 411 litres semble en faire davantage avec ses formes bien rectangulaires. De nouveau, si le Duster 4×4 n’est pas pertinent en dehors d’une nécessité de tout-terrain, le Duster tout court peut l’être largement pour une voiture familiale. Par contre, il ne faudra pas s’attendre au moindre plaisir de conduite à son volant. Le roulis se fait à peine sentir mais la direction est totalement floue. D’autant plus dans les champs où on se retrouve à avoir le volant à 120° pour avancer tout droit.
La sortie 4×4 avec ce Dacia Duster
On arrive (enfin !) à la meilleure partie de cet essai. La sortie 4×4 avec les 3 frères (entre autres). On se retrouve à 9h pour se compter et grignoter le petit-déjeuner. Nous serons 7 dans 3 camions voitures :
- une Jeep Cherokee avec un joli 6 cylindres en ligne pour Alexi, Viacheslav (dit Slavik ou Slava, ça dépend des fois) et Sylvain,
- un énorme Ranger Raptor (à lire ici quand Victor aura rédigé son essai) avec son
V8V6 pour Victor et Clément, - Le Dacia Duster 4×4 pour Anton et moi-même. Comme pour l’année dernière, on ne change pas une équipe qui gagne. On ouvre le convoi car nous détenons l’itinéraire de la journée.
Lors de l’organisation en septembre dernier, Victor souhaitait qu’il pleuve abonnement pour bien en profiter. Les inondations dans toute la France, c’est sa faute. Avec deux mois d’intempéries, les champs étaient rincés. La forêt aussi. À cela s’ajoute la flotte du matin au soir. Ma mère répète souvent que je ne suis pas en sucre. Elle a raison, je n’ai pas fondu. Surtout avec mon K-way et mes bottes. Les carrosseries des voitures ne sont pas si sales que cela sur les photos car entre l’eau du ciel et l’eau du sol, les caisses ont pris des douches en permanence. Parfois des bains.
Dacia Duster 4×4 : le roi de la glisse
Alexi, avec son Cherokee, vous le dira perpétuellement : ce qui compte pour une sortie 4×4, ce sont les pneus. Bon, j’avais des 4 saisons et Vivaldi n’aide pas sur les terrains boueux. Le Duster permet d’être en traction puis de passer en 4 roues motrices avec la molette proche du frein à main. On peut utiliser le mode automatique ou le mode verrouillage pour garder la version 4×4 en permanence. Dès les premiers mètres sur l’herbe et la terre, on perçoit la différence entre 2 ou 4 roues motrices. Ce n’est plus le même véhicule.
Sa boîte courte prend enfin tout son sens, en 4ème, pour se balader. On commence tranquillement mais on peut s’amuser immédiatement. Un coup de volant et on entame la glisse légère et joueuse. Un peu comme à la patinoire quand on trouve son rythme de croisière avec énormément d’amplitude dans les mouvements sans pour autant dépenser beaucoup d’énergie. C’est pareil avec le Duster, on profite de la vie, à 30 km/h.
Le bonheur à 30 km/h
Je confesse ici que je prends plus de plaisir à passer partout à 30 km/h qu’à bombarder à 180 km/h sur des routes fermées. On n’a peur de rien, sauf de s’embourber. Mais ça, j’aime bien. C’est rigolo et ça donne des histoires à raconter. Plutôt que de s’emplafonner contre une glissière de sécurité. De plus, en bande, on se rassure à réfléchir à plusieurs et surtout à s’entraider. On ne laisse personne sur le bas-côté. Cependant, quand il faut grimper, on trouve les limites du Duster avec des pneus inadaptés.
Dans une petite montée totalement boueuse, l’adhérence manquait terriblement. Il aurait fallu plus de vitesse pour y arriver. Ce n’est pas grave, on a laissé tomber car on pouvait passer autrement. Plus tard, dans l’après-midi, une bien plus grande pente fut gravie en reculant pour prendre de l’élan. Il a fallu serrer les fesses pour la carrosserie mais les énormes ornières empêchaient les roues de se faire la malle et d’emmener la voiture dans les arbres. Je n’ai pas testé le contrôle en descente. Avec des pneus 4×4 et de l’expérience, ce Duster bluffe par ses capacités tout en restant confortable dans l’habitacle. Certes, on est secoués mais dans des bonnes conditions, bien assis. Le Dacia Duster 4×4 sur 3 roues.
Promenons-nous dans les bois avec le Dacia Duster 4×4
En s’enfonçant dans la forêt, on arrive sur des parties bien plus complexes. Anton sort sa tronçonneuse toute neuve pour dégager la voie en coupant du bois. C’est le moment où nous sommes plus nombreux dehors que dedans. La majorité guide les conducteurs. Avec des gestes simples et quelques mots comme « tourne un peu, remets droit, avance, stop, tourne un peu, remets droit, etc. ». Le (bon) conseil d’Alexi : « toujours les roues dans l’axe pour avancer, la surface est plus grande pour adhérer ». On attaque donc le franchissement avec une roue dans le vide. Le Duster s’en sort aisément. En soi, rien d’extraordinaire pour les professionnels du tout-terrain. Mais pour les amateurs comme moi, c’est l’éclate totale. Une journée à s’amuser entre copains avec une pause sandwichs le midi, ça ressemble drôlement à la belle vie.
Le prix du Dacia Duster 4×4
La belle vie pour 27 200 €. Le prix du Dacia Duster 4×4. Attention, à ce tarif, il est tout équipé dans sa finition Journey, son bel Orange Arizona (une couleur entre orange et marron contrairement à mes photos où il ressort rouge le plus souvent), ses jantes originales de 17 pouces, le Pack Techno (la super carte mains libres de chez Renault qui ouvre et ferme le véhicule tout seul en s’approchant ou en s’éloignant) et la roue de secours. En version 4×4, le Duster commence à 25 100 € et je trouve que c’est trop, 2 660 € de plus que le Jimny même s’il est difficile de comparer un 4×4 2 places contre un de 5 places. Pour autant, une déclinaison avec des jantes en tôle de 16 pouces et plus d’entrée de gamme dans l’équipement pourrait convenir davantage. En somme plus essentiel et moins low-cost.
Le moteur et la consommation
On dispose d’un 4 cylindres diesel de 115 ch, plutôt bruyant comme un diesel et plutôt gourmand pas comme un diesel. On a la puissance nécessaire pour le quotidien à dépenser ou à s’insérer même si cette boîte empêche d’en profiter correctement. Son poids relativement lourd de 1 417 kg (1 090 kg pour le Jimny) n’aide pas du tout sa consommation avec une moyenne à 6,8 l/100 après 510 bornes. On alterne entre 6 l en péri-urbain et 8 l sur autoroute. Comme c’est quasiment les 7 l/100 de la Série 4 Coupé de 340 ch pour pas du tout le même agrément, j’en attendais plus de Dacia. Enfin, moins. En consommation.
En conclusion
Si vous roulez plus de 200 jours par an dans des conditions météorologiques difficiles avec une nécessité de passer partout, alors prenez un Suzuki Jimny. Si vous avez besoin d’espace supplémentaire (matériel, enfants, chiens, ce genre de trucs) alors prenez ce Dacia Duster 4×4. Il offrira une efficacité étonnante avec l’obligation d’y adjoindre des pneus hiver voire même des pneus 4×4. En partant de là, il sera possible d’acquérir une tranquillité d’esprit avec une technologie tout-terrain éprouvée et même dans un confort surprenant.
Pour autant, le quotidien sur les routes bitumées des villes pourra vite vous faire regretter ce choix à cause d’une boîte de vitesses particulièrement mal étagée pour ce type de trajet. Le plaisir à son volant ne sera plus présent et la consommation relativement élevée pour un diesel puis la qualité médiocre de l’écran vous rappelleront que Dacia ne peut pas toujours réaliser des miracles, comme avec sa Sandero Stepway de 110 ch.