Quelle chance de pouvoir découvrir et rouler cette mythique Datsun 240Z pendant 6 jours et 500 km grâce à Nissan France. Je vous raconte tout dans cet essai.
Marque et modèle | Datsun 240Z |
Version/finition | Essence |
Prix du modèle essayé | 40 000 € |
Kilomètres parcourus | 482 km |
Consommation constatée | 13 l/100 km |
Type de moteur | 6 cylindres en ligne 2,4 l |
Puissance | 150 ch |
Couple | 197 Nm |
Boîte de vitesses | Manuelle à 5 rapports |
Transmission | Propulsion |
Poids à vide | 1 025 kg |
Accélération (0 à 100 km/h) | 9,8 s |
Vitesse maximale | 195 km/h |
La fiche technique complète (bientôt) |
Le contexte de l’essai
Si vous aimez (vraiment) Hoonited, vous avez lu nos (quasiment) 200 essais. Si vous voulez vous rattraper (car il n’est jamais trop tard pour bien faire), c’est par ici. Maintenant que vous êtes à jour, je n’ai plus besoin de vous expliquer que Nissan France possède un parc d’anciennes voitures dont la Fairlady 2000, la 300 ZX et la 350Z, toutes essayées par votre site préféré (Hoonited ! Pas Automobile Propre !) et même deux fois pour la 300 ZX.
Par contre, je vais encore et encore remercier Nissan et leur prestataire Rotalys pour l’entretien et la restauration de ces caisses. J’ai proposé le même projet à BMW (avec une M1, une Z1, une E30, une i8), c’est en cours de discussion. Oui, en plus de partager le même préparateur, BMW a aussi un lien avec Datsun/Nissan car il partage un 6 cylindres en ligne. Pas le même, hein. Mais bien un L6 qui devient tellement rare aujourd’hui. Tout ça pour dire que c’est un kif absolu de tester des vieilles bagnoles, surtout pour un novice comme moi.
Datsun 240Z : mon nouveau rêve
J’ai grandi avec le fantasme de la Porsche 911. Particulièrement la 997 mais aussi toutes les versions (sauf la 996 moche) puis j’ai découvert un nouveau monde grâce à Twitter. Je ne connaissais pas bien les Japonaises à part celle de rallye comme la Subaru Impreza et la Mitsubishi Lancer Evo. Puis j’ai suivi ce compte Twitter d’un jeune Ukrainien de Melun qui n’arrêtait pas de parler des Nissan GT-R (notamment la R34 qu’il aurait pu acheter s’il n’était pas aussi nul pour ranger ses fiches de paie).
C’est donc grâce à mon futur patron que j’ai aimé la Nissan Skyline 2000 GT-R et via le compte @DatsunFrance que j’ai eu un crush pour la 240Z. Au point de m’en offrir un calendrier. Avec son physique de muscle car Type E nippone, je ne pouvais que l’adorer. Dès lors, j’étais sur le coup depuis des mois pour l’essayer. Entre d’autres prêts et des révisions complètes, avec un contrôle technique totalement vierge en 2024 ; enfin cette Datsun 240Z s’offrait à moi. Pour 6 jours.
Un peu d’histoire de la Datsun 240Z
La marque Datsun appartient à Nissan depuis 1933 et nous la connaissons notamment en Europe pour ses modèles rebadgés de Fairlady Z (son nom au Japon). Ici, c’est donc la Datsun 240Z qui a été produite à plus de 200 000 exemplaires entre 1969 et 1973 dont seulement 750 en France. Mon modèle doit sûrement dater de 1971 avec une première immatriculation en 1972. D’après @DastsunFrance, c’est une phase 1,5 juste avant l’arrivée de la phase 2. Il s’agit principalement de changement de badge sur la custode ou de tableau de bord mais on garde la même mécanique avec un 6 cylindres en ligne double carburateur 2,4 l de 150 ch. Son nom « 240 » provient bien de cette cylindrée et pour les versions suivantes, « 260 » et « 280 », je vous laisse deviner.
Double carburateur pour le prix d’un
Revenons au double carburateur. Je vais essayer de vous expliquer. Quoi ? Je suis le seul à ne pas connaître son fonctionnement ? Je bluffe un peu car j’avais déjà testé la chose avec la Fairlady 2000. À savoir : galérer pour démarrer ! Le carburateur régule (mal) le mélange air/carburant pour entrer dans les cylindres. Les voitures modernes disposent d’un injecteur électronique qui s’occupe de tout gérer au plus juste et surtout de démarrer sans starter. Tous les matins (et même certains soirs), j’ai joué de la manette. Pour réussir à enclencher le moteur, le p’tit levier envoyait plus de carburant que d’air et ainsi facilitait une montée en température.
Rapidement ? Non. Entre 5 et 10 min. La première fois, j’ai pensé que tout était bon. Grave erreur. Trou complet. Avec un copain à mes côtés sur une voie rapide. La voiture n’avait plus aucune puissance. Il a fallu 2 min à chaque fois pour repartir. Oui à chaque fois puisque cela s’est reproduit à 4 reprises. Par la suite, j’ai pris le temps nécessaire pour alimenter ce double carburateur. C’est faux. J’ai voulu partir après 3 min. Le moteur cale. Il faut apprendre la patience. Moi qui n’ai jamais compris ceux qui laissent tourner leur diesel en attendant quelqu’un ou quelque chose, j’avais honte de laisser cramer de l’essence à l’arrêt. Par contre, bien chaude, la 240Z démarrait plus vite que toutes les thermiques modernes. Juste une pression sur la clé et en avant la Datsun !
La boîte pour le moins capricieuse
Alors en avant si on arrive à passer la première. Le levier de vitesses annonce une grille en double H. Sauf que ce H s’apparente plus à un Y. Il faut la trouver, cette première. Au point parfois d’enclencher la seconde pour se lancer. Ce fut évidemment une question d’habitude et de pratique. Même si ça accrochait encore de temps en temps les jours suivants, je passais les rapports de façon plus fluide.
Nissan va faire réviser cette boîte pour un meilleur agrément (et ajouter du WD-40 sur la pédale d’embrayage). En soi, ça n’a pas été rédhibitoire. Cela ajoute un charme supplémentaire, après le démarrage. Dans tous les cas, moi qui suis d’un naturel inquiet, je ne l’ai jamais été (ou presque) avec cette bagnole. Elle est vivante, elle a ses contradictions et surtout ses humeurs. En fonction de la vie. Ou de la météo. Ou du vent. Ou du contexte politique.
Un peu déçu par le moteur ?
Sur le papier, avec un 6 cylindres en ligne 2,4 l, je m’attendais à plus de puissance, plus de force et même plus de sonorité (à écouter ici). Surtout en comparaison du 4 cylindres 2 l de la Fairlady 2000. Mais celle-ci était équipée d’un carburateur Mikuni qui devait tout changer, sans parler du fait que ce soit un roadster. Avec les cheveux à l’air libre, les sensations sont forcément différentes/décuplées. Au point de penser que la 240Z accélérait moins fort.
D’après les stats, c’est bien le Coupé qui tape le 0 à 100 km/h en 8,3 s contre 9,7 s pour le cabriolet. Mais dans la réalité, on s’approche plus des 9,8 s. Donc comme la Fairlady 2000, ça doit se valoir. C’est toujours plus d’1,5 s supplémentaire que ma belle Polo 150 ch. Oui je compare une voiture de 1971 en boîte manuelle avec un autre en DSG7 de 2021.
Forcément, quand on a goûté au moteur avec un turbo, on s’attend à plus que 197 Nm de couple. Même si je n’ai pas eu de difficultés à monter dans les tours pour taper les 5 500 par min afin d’exploiter la puissance maximale. Après et jusqu’à 7 500 tr/min, c’était juste pour le plaisir sonore. Celui-ci variait beaucoup et cela donnait encore plus de charme quand on touchait le Graal. Au final, je l’ai aimé ce moteur, il fallait un peu de temps pour l’appréhender et l’apprécier à sa juste valeur.
Inadaptée dans la circulation dense
Encore faut-il pouvoir l’exploiter en ayant le champ libre. Car autrement, dans la circulation dense, pour ne pas dire dans les bouchons, c’est vraiment chiant. Le ralenti tourne correctement donc aucune crainte de caler mais on broute à végéter dans les 2 000 tr/min. Avec de nombreux à-coups. Déjà que la pédale d’accélérateur n’apparaît pas évidente à gérer avec un cran passant du simple au double, engendrant des secousses pour les occupants. Même en y allant doucement, l’allonge sous le pied n’aidait pas dans un trafic saturé.
En ville, sans personne devant soi, on peut s’en sortir. Avec seulement 1 025 kg, on ne souffre pas trop sur les dos d’âne. Comme en Lotus. Les suspensions sont fermes mais supportables avec le rembourrage des sièges. La meilleure position reste celle du conducteur qui peut se maintenir avec les mains sur le volant. Pour le passager, il aura tendance à glisser sous la ceinture de sécurité. Enfin, si on peut parler de sécurité.
Terriblement saine cette Datsun 240Z
C’est bien ce qui frappe dès qu’on monte dans cette 240Z des années 70. L’absence totale de sécurité. On a des ceintures sans enrouleur et on imagine les dégâts en cas de crash. Bien sûr que je n’ai pas fait le débile car, en général, je tiens à rendre les voitures intactes et dans ce cas particulier, je voulais continuer de vivre pour notamment rédiger cet article.
Pour autant, même sous la pluie, je n’ai jamais ressenti de peur car cette Datsun s’avère ultra saine. Elle ne piège jamais. On pourrait presque lui reprocher un manque de fun pour une propulsion. Il faudra un talent de pilote pour la faire glisser et aussi pour la maîtriser. Car en plus (ou plutôt en moins) de l’absence d’ABS et d’ESP, on n’a pas non plus de direction assistée. Habituellement, on galère pour les manœuvres faute de vitesse. Ici, même avec de l’allure, on se fait les bras pour tourner le grand mais fin volant en bois. Ou en imitation bois.
Je vois régulièrement des 240Z préparées pour le circuit et je n’ose imaginer la bagarre pour se placer. La direction reste relativement précise mais il faut s’employer dans les virages serrés. La prochaine étape, la filer à un pilote pour me montrer toutes ses capacités. J’ai à peine réussi à la mettre en dérive dans un rond-point imaginaire. On pourrait presque lui reprocher un manque de fun et surtout d’agilité. Pour les freins, j’ai cru que je n’avais rien. Mais comme souvent, il faut vraiment enfoncer la pédale. Et là encore, aucune crainte, ça reste droit. Tout comme sur autoroute à 130 km/h, à 3 500 tr/min en 5ème, ça reste bien dans la file, tout en stabilité. Une bonne surprise. Malgré le bruit.
La vie à bord
Car oui, l’insonorisation dans une sportive des seventies, c’était en option. Finalement, pas de bruits d’air tant le bruit du moteur s’entend dans l’habitacle. On aura aussi des grincements et des couinements notamment dans le coffre mais c’est le jeu. Finalement, c’est l’absence de climatisation qui reste le plus difficile pour moi. On a vite chaud à s’employer et entre la ventilation et la fenêtre ouverte, on ne trouve pas vraiment d’air frais. J’ai mouillé le dos de mon tee-shirt sur ces sièges en cuir. Cela fait partie de l’expérience. Puis quelle splendeur ce rouge entre carmin et bordeaux sur les sièges et les portières.
Autrement, quel soulagement de n’avoir aucun bip à la con entre la survitesse ou le maintien dans la voie. Je n’ai même pas regretté Android Auto car avec un support de smartphone, j’avais Google Maps devant moi. Puis pour la radio (inopérante tout comme l’horloge) ou Spotify, j’ai utilisé une enceinte portative JBL. (Toutes ses marques font l’objet d’un partenariat rémunéré.) (C’est faux.) Quant au coffre, on doit se situer entre 180 et 200 litres mais ça donne un ressenti plus volumineux n’ayant que le hayon au-dessus. On pourra utiliser le rétroviseur central plutôt que celui de gauche vu son réglage approximatif.
La couleur comme seul regret
Finalement, mon seul regret aura été cette couleur blanche perlée. Je l’aime tellement en orange, en vert, en jaune ou en bleu que c’est dommage d’avoir une version de société. Tout comme ses enjoliveurs de 14 pouces qui font bas de gamme. Mais bon, on ne va pas trop chipoter car c’est une chance incroyable d’avoir pu en profiter durant 500 km. Aujourd’hui, elle doit valoir dans les 40 000 €. Peut-être un peu plus avec toutes les révisions. Pour le compteur, il annonce 96 000 km mais il est fort probable qu’on en soit à 196 000 km car seuls 5 chiffres peuvent apparaître.
La consommation (approximative) de la Datsun 240Z
Sans ordinateur de bord, j’ai tenté un calcul avec les litres et les kilomètres. On tombe à une moyenne de 13 l/100 km, peut-être un peu plus parfois. Ce chiffre est loin d’être précis tout comme la jauge d’essence. Elle était très proche du vide donc j’ai accouru à la station. Pour finalement ne mettre que 33 litres avant que le SP98 (et son additif) débordent du réservoir. Celui-ci a 60 litres de capacité. Soit une autonomie plausible de 460 km.
En conclusion
Il faut toujours réaliser ses rêves. Surtout quand on le peut. Cela permet de les confronter à la réalité. Regarder cette Datsun 240Z pendant une semaine m’a confirmé que sa ligne demeure fantastique de beauté. Même en blanc. Malgré un long démarrage à chaque fois, ce fut une joie de rouler à son volant et de profiter d’un comportement toujours sain. Surtout quand les espaces le permettent. En effet, quand la circulation se densifie, il devient plus compliqué d’apprécier cette quinquagénaire notamment avec sa boîte capricieuse. Au final, si je devais faire un choix aujourd’hui entre deux Datsun, je prendrais la Fairlady 2000 pour son côté découvrable engendrant encore plus de grandes sensations à son volant. Et si j’étais riche, je m’offrirais en plus une 240Z orange pour ensoleiller mes balades hivernales.