Lotus 340R, l’essai exceptionnel du meilleur roadster au monde !
Lotus 340R
53 300 €
Entre 52 000 et 70 000 €
4 cylindres 1,8 l
Essence
192 ch
189 Nm
Manuelle à 5 rapports
Propulsion
4,4 secondes
209 km/h
3,62 m
1,70 m
1,08 m
2,30 m
701 kg
40 l
80 km
Un bâton (sûrement 14 l / 100 km)
225 g
12 CV
La Lotus 340R, déclinaison de l’emblématique Lotus Elise, se découvre et s’essaye sur les routes du Morvan durant une superbe matinée printanière d’octobre.
Le contexte de l’essai
Dans la vie sur Twitter, tu postes deux photos de Secma F16, tu fais des blagues, tu discutes roadsters et tu te retrouves avec une proposition d’essayer une Lotus 340R. Je n’arrive toujours pas à y croire. Pourtant, c’est bien réel puisque je vais vous le raconter ici.
Guillaume, que je vais remercier 340 fois dans cet article, m’a donc invité à se retrouver à Avallon, dans l’Yonne. L’alignement des planètes étant parfait, j’ai pu m’y rendre avec la Mercedes Classe C Break à l’essai. Difficile de créer un choc des cultures plus flagrant. Anglaise contre Allemande. Roadster contre break. Sportive contre familiale. Légère contre lourde. Rudimentaire contre technologique. Basique contre confortable. Je m’arrête là car on pourrait y passer la nuit. Un dernier élément de comparaison : quasiment la même puissance (192 ch contre 204 ch) et une tonne d’écart entre les deux voitures.
« Vous voyez ce que ça fait déjà une tonne, Larmina ? »
La Lotus 340R
On ne va pas refaire le match du constructeur Lotus, vous connaissez par cœur la devise de Colin Chapman, « light is right » : plus c’est léger, plus on digère vite (oui, j’écris ces lignes après mon retour de la cantine).
Pour la 340R, on prend l’éminent châssis 111, on lui colle le célèbre 1,8 litres Rover de 177 chevaux et on espère arriver à 500 kg pour un rapport symbolique de 340 chevaux à la tonne. D’où le nom. Bon, après quelques tests en 1999, les mecs de chez Hethel comprennent que c’est bien de faire des voitures légères mais que c’est encore mieux qu’elles ne s’envolent pas avec leurs occupants dedans. On notera qu’il faut s’armer de patience et d’une clé Allen pour accéder au moteur.
Nécessité faisant loi, la 340R sort à 701 kg. Ça reste tout de même 300 kg de moins qu’une mini-citadine depuis 10 ans. Et finalement, avec une petite reprogrammation (calculateur et arbres à cames), la Lotus développe 192 ch. Pour tous les détails et plus encore, je vous invite à lire la page passionnante de 111racers.com qui raconte la chronologie technique de ce modèle.
Reste le chiffre de 340 pour 340 (mercis à Guillaume) exemplaires produits dans le monde dont 10 pour la France ! En 2000, la 340R se vendait à 53 300 €. Aujourd’hui, c’est le montant de la fourchette basse qui peut même aller jusqu’à 70 000 € pour la plus haute.
La Lotus 340R de Guillaume
Parfois, pour un premier rencard, on vient avec un parapluie jaune ou une casquette rose. Histoire de bien se reconnaître. En l’espèce, quand un mec arrive en Lotus 340R, le doute n’est pas permis. Evidemment, elle a une gueule folle. J’ai toujours trouvé la Lotus Elise moche mais cette version roadster ultime, en Standard Grey Metallic aux reflets bleutés, me convainc immédiatement. Avec ses 4 roues aux extrémités (ou presque), ses jantes de 15 pouces à l’avant et de 16 pouces à l’arrière, son nez plongeant, ses lames de Formule 1, ses rétros de moto Aprilia, son double arceau, son spoiler et son échappement en toute liberté, je me dis qu’elle va donner ! Sachant que deux semaines auparavant, je ne connaissais même pas son existence.
Une histoire de passionnés
Autour de chouquettes (on n’est pas des bêtes), Guillaume me raconte sa passion partagée avec son frère Thibault, des autos anglaises et particulièrement des Lotus. Entre Elise S2 et Exige S1 (et pas que), il fallait bien caser une 340R dans leur collection roulante.
À l’été 2021, direction la Corse avec un ami et un ami-mécanicien d’une concession Lotus pour acheter la rareté refaite à neuf, dans les règles de l’art.
C’est beau une île montagneuse avec ses routes sinueuses mais Julien, son propriétaire, se rend bien compte que passer d’un col à l’autre avec de la pluie une fois sur deux n’apparait pas comme des conditions optimales pour se faire plaisir et surtout assurer sa sécurité.
Coup de cœur assuré pour les 4 piquousés donc retour dans la journée avec la 340R chargée sur un plateau tracté par une Mondeo. Forcément, on ne rentre pas à 4 dans une biplace.
Merci à Julien et à Guillaume pour les photos de ce paragraphe.
En passager pour commencer
Justement, on monte enfin dedans ! À la place du passager pour commencer. L’idéal pour observer et se projeter. Encore faut-il réussir à s’installer et à s’harnacher. Ayant la souplesse d’un tronc de séquoia centenaire, il m’a été difficile d’enjamber la portière qui n’en est pas une puisqu’elle ne s’ouvre pas. La main doit s’appuyer sur l’arceau à l’arrière et non sur le pare-brise au risque de le briser. Vient ensuite la seconde jambe et on a l’impression de voir la scène d’un octogénaire galérant pour s’asseoir dans une baignoire. Sauf que celle de la 340R est en aluminium collé.
Prêt pour le grand saut ?
L’étape la plus difficile n’a pas encore commencé. Il faut verrouiller son harnais 4 points. Je n’ai toujours pas compris si je faisais un tour en voiture ou un saut en parachute. Heureusement, Guillaume me guide et me prodigue les subtils conseils pour s’attacher. Dès lors, impossible de bouger. Si vous avez oublié votre portable dans le coffre, c’est mort pour aller le chercher. De toute façon, il n’y a pas de coffre. À la limite, il peut se trouver dans la boîte à gants et vous n’aurez jamais l’amplitude pour le récupérer. De toute façon, il n’y a pas de boîte à gants. Enfin si, vous êtes assis dessus. Une partie du siège passager se soulève pour y déposer deux feuilles de papier.
Boules Quies obligatoires en Lotus 340R ?
Dès l’allumage du moteur, je sais pourquoi je suis venu avec des boules Quies. Pour autant, le plaisir de discuter d’hurler avec Guillaume prend le dessus. Vivons dangereusement.
Après quelques secondes, la sensation d’un relatif confort surprend. Avec ses amortisseurs Öhlins réglables, la 340R semble vivable sur routes. Toutefois, il ne s’agit pas des voies défoncées de la région parisienne avec des nids-de-poule tous les 700 mètres et encore moins des dos-d’âne tous les 300 mètres.
Une Lotus 340 sans trop d’R !
La chance d’avoir des conditions climatiques idéales avec du soleil légèrement voilé et de la chaussée complètement sèche. L’air relatif passe au-dessus du saute-vent et vient décoiffer les occupants de plus d’1m80, ceux que nous sommes tous les deux. Finalement, il n’existe pas de remous ultra bruyants comme dans la MX-5 RF bien qu’il serait ardu de les entendre vu les hurlements du moteur Rover.
Le pilote en chef s’assure de l’état du terrain et m’indique les modifications effectuées sur sa Lotus. Comme finalement sur toutes les Lotus. La force de ce constructeur repose uniquement sur le fait de vendre un châssis irréprochable. Tout le reste peut ou doit se tuner pour améliorer ou fiabiliser les éléments mécaniques dont le moteur qui ne demande qu’à gagner en puissance. On notera les morceaux de chatterton ici et là. Comme dit Guillaume, chez une Lotus, c’est normal. Toujours bon à savoir que le Scotch est compris dans le prix à 53 300 €.
À moi de prendre le volant
Après 10 min à bien profiter comme passager, voici venu le moment de prendre le volant. Donc pour cela, il faut réussir à se détacher. Ensuite, autant passer directement de l’autre côté en glissant sa jambe gauche puis sa jambe droite du côté conducteur. Tout le monde devinera que la meilleure place se situe avec le volant dans les mains. Rebelote pour s’harnacher, le temps d’écouter les derniers conseils notamment sur l’embrayage et le démarrage. En plus d’un simple tour de clé puis des deux secondes à patienter, on doit enfoncer le bouton central pour démarrer. L’impression d’allumer une fusée parée à décoller, en espérant ne pas avoir de problème, Houston.
Le bruit du moteur se fait encore plus prégnant de ce côté. On débraye, on passe la première et on commence à chercher le point de patinage. Grave erreur. Bien plus simple de mettre plein gaz ! Première, deuxième, troisième, sans rouler vite, ça permet de se familiariser avec l’environnement et de prendre ses marques tranquillement. De repérer que la troisième se situe réellement entre la troisième et la cinquième. La boîte n’a pas la précision d’une Mazda mais on lui pardonne (beaucoup). Aucun problème avec le fameux pédalier coupé décalé et on prend immédiatement son pied à l’utiliser.
Un copilote de luxe
Mieux que de découvrir la région en solo, Guillaume joue déjà au guide/copilote avec des indications précises sur le tracé « ligne droite, enchaînement de virages, routes dégagées, etc. ». Je ne vous le répète pas à chaque fois que toutes les communications se font en s’arrachant les cordes vocales. Déjà le moteur vocifère à 3 000 tours, alors imaginez à 6 000. En parlant des 3 000, regardez bien le compte-tours. Une graduation minimale entre 0 et 3 000. Pas la peine de s’emmerder à faire apparaître clairement cette zone puisqu’il ne s’y passe rien.
Monte dans les tours !
La Lotus 340R s’avère être une bagnole extrêmement intuitive. Je ne vais pas vous sortir la rengaine de l’homme qui fait corps avec la machine (ou l’inverse) mais un peu quand même. Plus on roule, plus on a envie de rouler pour apprendre et savoir ce qu’il est possible d’envisager. Avec ma vingtaine d’essais à mon actif, l’expérience n’est pas un peigne pour les chauves. Je sais dorénavant comment progresser rapidement et surtout en sécurité avec des automobiles pépères ou sportives. Comme à chaque fois, le projet n’est pas de finir dans le fossé. Encore moins avec un des 340 exemplaires existants. Toutefois, si t’as une Lotus, l’objectif reste bien de grimper dans les tours et de passer rapidement dans les courbes.
Vite avant le virage, vite pendant le virage et vite après le virage
La phase de repérage se termine. L’entièreté du projet Lotus prend sens. On a une bagnole ultra légère dans les mains, on a un moteur ultra hurlant dans les oreilles, et on a un châssis ultra performant sous les fesses. « Mouhvoumounvoumounnnnn, mouhvoumounvoumounnnnn, mouhvoumounvoumounnnnn ». Voilà le tintamarre qu’on émet en permanence.
La blague : on ne freine jamais (ou presque) sur les routes fermées du Morvan. Les tournants s’enchaînent quasiment à fond, avec une exceptionnelle précision de la direction — tellement hallucinant ! Ma seule appréhension provenait du freinage. Sans ABS, je craignais de finir tout droit. Finalement, on peut appuyer sur les freins sans trop d’inquiétudes. On pourrait presque piloter à une pédale avec cette absence totale d’inertie. La voiture ralentit dès qu’on lève le pied. À l’inverse, elle reprend toute sa puissance dès qu’on appuie. Peut-être mes moments préférés : en sortie de virage, volant droit, en troisième, 5 000 tours, pied au plancher, 7 000 tours et quatrième. Jouissif et grisant. Toutefois, sans jamais avoir peur. Sans jamais se mettre en danger. Sans jamais atteindre les limites.
Les deux mains sur le volant en Lotus 340R
Ça se pilote facilement une Lotus 340R ? Oui, à condition de garder les deux mains sur le volant. Comme pour toutes les voitures ? Oui mais non. Avec les productions modernes, il devient possible de conduite avec un petit doigt ou une seule main. Je ne dis pas que c’est bien, je dis que c’est réalisable. Avec une Lotus 340R, si tu ne gardes pas les deux mains sur le volant, elle se barre. Un peu comme dans une discussion où la personne ne garde pas toute son attention pour l’autre. La Lotus demande absolument une concentration maximale. T’as une demi-seconde pour passer ton rapport et après, t’as intérêt à reprendre ta position à 9h15. Ou 10h10, elle sait faire preuve de tolérance tout de même.
Pause fraîcheur
Le prétexte des photos me permet de prendre ma pause (syndicale). J’ai beau savoir qu’il ne faut pas conduire en tension et qu’il faut maitriser sa respiration, une petite pointe arrive dans le triceps droit. Rien d’handicapant, juste un rappel qu’il s’agit de sport (mécanique). De ce fait, j’apprécie de couper le moteur et de me dégourdir les jambes, en silence. Après les 8 minutes nécessaires pour enlever mon harnais.
C’est reparti pour un tour en Lotus 340R
Une nouvelle fois, cette Lotus 340R dégage une force impressionnante. Juste le temps d’en parcourir les contours et c’est reparti pour un tour. Avec l’envie d’aller taper les 7 500 tours.
Guillaume m’affirme qu’on s’habitue et qu’on prend de moins en moins de temps à se ligoter et à se désenchaîner. Je me marre bien à le voir essayer d’attraper ses lunettes de soleil qui sont au fond de la bassine, derrière le repose-pied. Obligé de se déficeler une nouvelle fois.
Contact, et je cale. Oui, j’avais oublié l’obligation d’envoyer la purée pour se lancer. Première, deuxième à fond (en fait, bah non, je devais être à 70 % à peine) puis troisième avec ce champ de vision qui se rétrécit au point de ne pas apprécier le paysage ni même les compteurs. La route, encore la route et toujours la route. Guillaume ne peut plus me parler au risque de devenir aphone donc il me fait des gestes avec son bras gauche pour m’informer des épingles à venir et du freinage à appliquer. Un langage parfaitement compréhensible.
Quelques fois, j’ai cru que je pouvais poursuivre dans le même rythme effréné mais il était là pour me calmer. Je confesse avoir peut-être un peu glissé. Par contre, sur une magnifique ligne droite de près d’un kilomètre, je reste en troisième pour dépasser les 7 500 tour/minute. Au son, j’ai la sensation de toucher les 15 000 tours/minute. Saisissant. Encore maintenant, je ne sais pas ce que j’ai préféré entre les virages et les « tout schuss ». Comme on ne dit pas en Angleterre.
Rouler à la cool
Guillaume devant retrouver sa belle-famille pour le repas dominical, c’était l’heure du retour. L’occasion de tester la cinquième à 80 km/h. Bon, ce rapport sert vaguement à diminuer le boucan. Cependant, avec le soleil au zénith, je profite de cette belle vie en roadster. Paradoxalement, bien plus qu’en NA. Le pare-brise me protège toujours suffisamment des bruits d’air et je préfère complètement la radicalité de cette Britannique face à la supposée polyvalence de la Japonaise.
Evidemment, je ne prendrai jamais la Francilienne pour me rendre au boulot en 340R. Ni comme je ne prendrai pas une MX-5. Donc à choisir, je prends la Lotus pour le week-end. Et je bosse mes passages en courbe pour aller à l’extrême limite. En parlant de limite, la traversée des villages devient l’enfer pour la boîte. Ça ne va pas en deuxième et ça broute en troisième. En marche arrière pour manœuvrer, on ressent encore plus l’absence de direction assistée. En bonus, l’air chaud s’engouffre sur les jambes et aucun moyen de s’en protéger. On s’en fout de tout ça car on va bourriner à la sortie du lieu-dit.
La vie à bord
Peut-on parler de vie à bord d’une Lotus 340R ? Deux compteurs, cinq boutons dont un pour chauffer le pare-brise et éviter la condensation sur celui-ci. Un petit volant et deux commodos bien trop loin des (petites) mains. Comme s’il n’était pas prévu de mettre les clignotants et d’utiliser les essuie-glaces. Ainsi que d’avancer son buste à un stop. C’est mignon d’essayer. C’est impossible en étant harnaché.
Conclure avec la Lotus 340R
La Lotus 340R devient à mes yeux le meilleur roadster du monde. Une baignoire sportive roulante. Un bonheur extrême et pourtant accessible. Enfin accessible quand un passionné vous propose de l’essayer. Avec ces 340 exemplaires dans le monde, je mesure la chance que j’ai pu d’avoir ces 2h au côté de Guillaume et au volant d’une extraordinaire automobile.
Ne faites pas d’enfants et achetez-vous une Lotus 340R. Vous en aurez pour votre argent. Je me remémore encore et encore les virages pleine balle et le tapage dans mes oreilles. Sans aucune souffrance et avec une joie intense.
Toutes les photos de la Lotus 340R
Cœur sur Guillaume avec des morceaux de Scotch pour ce partage.
+ La gueule de l'engin.
+ La facilité pour s'amuser.
+ Les vitesses en courbe.
- La boîte en ville.
- Le chatterton.
- L'envie de claquer 53 300 €.