Nous vous proposons l’essai du Mokka-e, le SUV urbain 100 % électrique d’Opel, dans sa version « ultimate » haut de gamme, avec une légère particularité : aucune prise domestique ni borne de recharge à disposition pendant une semaine et 500 km !
Le chapeau est un peu provocateur et la réalité n’a pas exactement été celle-là. Vous verrez bien les subtilités dans le récit. Cependant, tout ce que vous avez lu / entendu / vu sur l’utilisation des véhicules électriques est vrai ! Rien ici n’ira à l’encontre des mérites et des critiques sur cette nouvelle génération de voiture. L’objectif sera de narrer une expérience personnelle (une première fois qui ne s’oubliera pas) qui pourrait bien ressembler à des situations collectives. Vous êtes donc au courant et pouvez charger la page de votre navigateur Internet pour une lecture électrisante ! Ces jeux de mots sont contractuels.
Une autonomie de 328 km (norme WLTP) pour l’Opel Mokka-e
La première interrogation (et la seule ?) pour une voiture électrique questionne son autonomie. Celle-ci s’annonce à 328 km. Selon la fameuse norme WLTP, le doux acronyme pour « Worldwide Harmonized Light-Duty Vehicles Test Procedure » qu’on peut traduire par « ça serait bien qu’on fasse une règle mondiale pour permettre aux consommateurs de se situer dans le marché globalisé et concurrentiel du capitalisme qui détruit la planète en donnant des chiffres à peu près cohérent sur les consommations de carburant (ou l’autonomie pour les électriques) ainsi que les émissions de gaz d’échappement ». Cette norme ressemble à toutes les normes. Elle donne une tendance majoritaire sans intégrer des situations minoritaires. En l’espèce, le test par un débutant dans le milieu qui veut faire joujou avec une grosse pile à quatre roues. Aussi, les quelques données de consommation, enfin, d’autonomie seront à prendre avec des pinces à bec pincettes.
Opel Mokka-e : les premiers kilowatts partis en fumée !
Conduire une voiture électrique s’apparente à une toute nouvelle expérience pour un automobiliste. Ça ne ressemble en rien au thermique. Déjà, le démarrage. Vous voyez quand on tourne la clé dans le démarreur d’un V8 américain ? Enfin, vous entendez ? Hey bien là, vous n’entendez rien. Cette (non-)sensation est déjà connue de ceux qui roulent en hybride. Pour autant, ça reste toujours troublant.
Le couple d’une électrique. Y a toujours du monde pour parler du couple d’une électrique ! A raison ! Pour l’Opel Mokka-e, il s’affiche à 260 Nm. Donc je prends le volant et sans attendre que le moteur soit chaud, je teste le couple ! Pas comme un sauvageon, non. Comme un essayeur responsable. Le pied droit, gentiment sur la pédale. Le troublant du démarrage se perpétue au roulage. Le ressenti du mouvement se confusionne avec l’absence d’un son thermique. La voiture avance sereinement et transmet son énergie positive à son pilote. Ou l’inverse. Après la prise en main réglementaire et sécurisante ; il est temps d’appuyer sur le champignon (bio puisqu’on veut sauver la planète) pour se rendre compte immédiatement de l’intérêt jouissif du Mokka-e : son accélération !
Le couple d’accord, la boîte de nuit vitesse, surtout !
Il s’agit souvent d’évoquer la puissance électrique avec son couple immédiat. A mon sens, c’est surtout la boîte de vitesses à mono-rapport qui fait tout l’intérêt de la chose. C’est linéaire ! Certes, les boîtes automatiques offrent aujourd’hui bien plus de confort et de performance même pour des milieux de gamme qu’auparavant. Pour autant, parfois, elles ne se positionnent pas sur le rapport adapté à la situation. Avec une boîte à un seul rapport, ça règle la question.
L’Opel Mokka-e n’est pas une Tesla Model S Plaid ; aucune nuque ne sera brisée dans son habitacle. Nonobstant, ce SUV urbain a de la puissance sous le capot (et sous le plancher où sont logées les batteries) pour exceller dans les voies d’insertion. Les 100 kW soit 136 ch correspondent bien aux performances annoncées sur le papier. Malgré son poids de 1 523 kg, soit 228 kg de plus que sa sœur en version essence de 130 ch ; la facilité pour accélérer est surprenante.
La conduite de l’Opel Mokka-e
L’Opel Mokka-e offre du confort sur la route malgré ses jantes 18 pouces. Il est possible que les suspensions du groupe PSA s’apparentent davantage à l’hydropneumatique de Citroën qu’à la fermeté de chez Peugeot. Le sifflement léger de l’électrique paraît inaudible lorsque la conduite est fluide. De plus, le « park silence » avec vitrage latéral feuilleté (j’adore les tartes mais ce n’est pas le sujet) limite considérablement les bruits d’air. Un bonheur auditif. Les trois modes de conduite indiquent la puissance disponible avec un ressenti immédiat :
- Eco de 82 ch.
- Normal de 109 ch.
- Sport de 136 ch.
La pédale de gauche se montre pertinente dans son toucher et le mode « B (Brake) » permet de jouer avec les décélérations et le frein moteur. Ça se gâte pour la conduite sportive. Dès que le rythme se fractionne, avec virages et freinages ; l’Opel est à la peine. La traction tombe dans ses travers de survirage. Si vous comptiez faire le rallye Monte-Carlo-e, abandonnez l’idée. Quand le pilotage devient saccadé et agressif, la Mokka-e sifflera bien plus que trois fois. Le son de l’accélération en devient dérangeant. La colonne de direction est ultra lourde. A l’opposé de ce qu’on pourrait attendre d’une citadine. Nul besoin d’être un bucheron canadien pour tourner le volant mais cela apparait en contradiction avec sa philosophie moderne.
La vie à bord en Mokka-e
Justement, parlons modernité ! Les compteurs ! Une des plus belles réussites de cette Mokka-e. C’est simple, c’est facile, c’est beau, c’est pratique, c’est parfait. Une manipulation permet de modifier l’affichage de l’écran 12 pouces avec des données différentes ou complémentaires. Ma préférence se portera sur celui avec trois compteurs :
- L’indicateur de puissance : « charge », « éco » et « power » qui donne l’information quant à son « régime moteur électrique » ainsi que pour la recharge lors des phases de décélération ou de freinage.
- Le compteur de vitesse : qu’il faut absolument surveiller, notamment en ville, car ça monte vite !
- L’indicateur de batterie : qui te fait flipper, notamment sur autoroute, car ça descend vite !
L’intérieur apparaît flatteur, surtout à l’œil. Les problèmes commencent au toucher ! Terriblement plastoc ! Vous voyez le dimanche matin quand Jérôme Chont tapote les habitacles pour s’assurer ou non de la qualité de ceux-ci. J’ai procédé comme lui et le constat est cinglant : ça fait cheap ! Enfin, ça fait voiture à 20 000 € max et non au double. Idem pour le toucher du volant qui n’est pas au niveau. Par contre, quel confort qu’il soit chauffant. Surtout durant ces matinées automnales.
L’intérieur
Les commodos en forme de V sont une nouvelle fois trop loin pour les enclencher aisément. Je poursuis avec un avis sévère : les sièges. En cuir et Alcantara avec de nombreuses surpiqûres. Je n’aime rien des sièges ; ni la forme, ni la texture, ni la position, ni le dessin et ni l’assise. Ah si, j’aime qu’ils soient chauffants, eux-aussi.
L’ergonomie de la planche de bord s’avère pertinente et agréable. Son usage couplé à l’écran de 10 pouces et Android Auto offre de la sérénité au quotidien. Contrairement à son GPS natif dont la navigation apparaît moche et lente. Le système audio à six haut-parleurs se montre correct. Les vitres s’ouvrent lentement en 3,10 secondes. Discret détail gravé sur le vide-poche : un requin. Ça ne sert évidemment à rien ; c’est donc totalement indispensable.
Les aides technologiques Opel
Toutes les aides modernes sont présentes. Elles fonctionnent facilement et leur mise en place ou leur désactivation s’opère intuitivement. Notamment le régulateur de vitesse avec un affichage efficace en complément de la lecture des panneaux « Opel eye » opérante. Les feux Matrix, qui jonglent automatiquement entre feux de croisement et feux de route ou qui limitent le faisceau lumineux, sont appréciables même si je n’ai pu suffisamment les expérimenter en pleine nuit. Tout comme heureusement le freinage automatique d’urgence ; pourtant bien présent d’après le constructeur.
Par contre, la caméra de recul n’est qu’une 180°, avec une résolution moyenne, là où on s’attend légitiment à une 360° du fait du park city premium à 200 €. A cela s’ajoute l’aide au stationnement con comme une bite un balai. Il prend deux ans pour scanner son environnement puis fait échouer la manipulation trois fois sur quatre. Quand il se lance réellement ; il peut aussi à tout moment quitter le navire. Vous vous retrouvez à finir ce qu’il a mal commencé. Et quand vous n’êtes pas doué (comme moi), l’agacement devient grand !
Un look magnétique pour l’Opel Mokka-e
Une fois n’est pas coutume, le physique de l’Opel Mokka-e intervient (presque) à la fin de cet article. La technologie et l’usage de l’électrique ont pris probablement le pas sur ce point. Comment positionner la marque allemande dans un catalogue de quatorze constructeurs automobiles ? Rendons à Opel ce qui appartient potentiellement à PSA et dorénavant à Stellantis.
En lui donnant un créneau : les jeunes familles et la mode urbaine ! Le SUV prend à son compte tout l’attirail moderne : une signature lumineuse affirmée, de la personnalisation et du bicolore flashy ! Le vert « signal » tire bien la sonnette pour se faire remarquer à tous les coins de rue. Comme annonce le responsable du parc presse Opel, que je remercie ici pour le prêt, dont je cite les propos : « on en a marre des voitures noires ». Je partage pleinement ce point de vue et le Mokka en donne pour son argent à ce niveau.
L’option bicolore
L’option bicolore (toit, capot et rétroviseurs noirs) à 300 € s’harmonisent avec les jantes étoilées. Clivant mais pertinent ! Comme les feux diurnes qui permettent de reconnaître immédiatement le nouveau style Opel. L’ensemble est un petit-gros SUV urbain qui s’affirme avec des lignes carrées et marquées. Notamment pour sa poupe. De ce fait, les places arrière sont condamnées pour un Vtyok (d’1m87) avec le crâne dans le plafonnier et des appui-têtes devenant des appui-cous. Concernant le coffre, il s’ouvre en appuyant sur un bouton situé au-dessus de la plaque d’immatriculation et se referme astucieusement avec une poignée bien placée. Son volume de 355 litres est moindre que les 405 litres de son frère jumeau, le Peugeot e-2008. De plus, (ou de moins) les grands câbles de recharge phagocytent encore plus l’espace disponible.
L’autonomie n’est pas le problème ! La solution, c’est la recharge !
Finalement, l’autonomie, on s’en fiche ! En France, la distance moyenne entre son domicile et son travail s’affiche à 11 km. L’aller-retour est donc de 22 km quotidiennement. A cela, on ajoute les détours avec Kevin qu’on dépose à l’école, avec les courses de la semaine, avec Germaine au bridge le mercredi aprèm, avec le coiffeur en fin de journée et parfois avec Tigrou chez le véto. On n’arrive que rarement à 328 km dans une journée ! Donc que le Mokka-e s’épuise en 328 km ou en 200 km, ça ne change rien à l’affaire ! Le problème sera de le recharger dans des conditions adaptées à son usage !
Peut-on réaliser l’essai d’une voiture électrique sans possibilité de le recharger ? Cet article est en la preuve. Je vis en appartement dans une copropriété où il n’existe pas de borne de recharge pour des véhicules électrifiés. (Pas la peine de gueuler contre le conseil syndical ; j’en suis son président. Aucun des propriétaires n’a fait de demande d’installation à ce jour.) Heureusement, la ville propose trois bornes à quelques centaines de mètres de mon habitation. Aussi, je découvre les joies du câblage avec un chargeur triphasé OBC en option à 900 € telle une poule avec un couteau. Pas beaucoup plus malin que le gallinacé pour comprendre le fonctionnement et surtout pour s’assurer de sa bonne marche. En scannant le QR code, l’application s’installe et semble permettre facilement le paiement. Bien évidemment que non. La première borne émet un message de dysfonctionnement.
Par chance, une seconde se situe à côté. Même procédure pour un résultat semble-t-il différent. Le contact s’établit, de quoi repartir à pied chez soi ; tracassé toutefois. En effet, ça paraissait trop beau. De retour après 2h30, aucun pourcentage supplémentaire à la batterie. L’indicateur restait bloqué à 42 %. Un nouveau message apparaissait sur l’application indiquant que le service de paiement en ligne déconnait. Une alternative : le paiement via la carte de recharge ! Celle-ci se commande facilement et arrive cinq jours plus tard par courrier postal. Pile au moment où je rendais la Mokka-e. Quel plaisir.
Un coup de foudre
Je me retrouve donc comme un clampin avec une bagnole de 44 000 € à chercher des bornes de recharge angoissant à l’idée de contacter un dépanneur ! La solution sera ma chérie ! Enfin, son pavillon ! En plus de ses nombreuses qualités, elle possède aussi un garage, avec une prise, attenant à sa maison. Est-ce que le Mokka-e rentre dedans ? Bien sûr que non. C’est le principe d’un SUV. Dernière chance : son allée. Me voilà donc à brancher l’Opel électrique avec une rallonge passant par la fenêtre de la cuisine. Dès lors, l’ordinateur de bord annonce 21h pour recharger 71 %. Sauf qu’à 6 km par heure, il faudra réellement 50 heures pour atteindre le niveau maximal !
Un non-sens en comparaison d’une station-service avec un plein de carburant en 2 minutes et 60 €. Le budget pour une charge complète du Mokka-e, avec un prix à 0,18 centime le kWh, serait de 9 €. Ce n’est pas la mort du petit cheval mais quelle contrainte ! Volets presque fermés mais fenêtre ouverte toute la nuit ; je vous laisse imaginer la tension et la scène (de ménage) pour éviter le coût de la panne. Ça se règlera par un resto, aux chandelles.
En conclusion
Durant cet essai, j’ai cauchemardé rêvé que je roulais en Mokka-e à la recherche de bornes pour finalement tomber en panne de batterie dans un village corse à côté d’une église. En espérant un signe du bon Dieu. Sûrement une métaphore quant à la responsabilité des pouvoirs publics. De plus, le relevé des mesures de consommation fut laborieux avec des recharges éparses et un ordinateur de bord peu lisible. La question n’est pas donc celle du bien-fondé de la révolution électrique mais de la réalité de sa mise en place.
Aujourd’hui, il m’est impossible de faire ce choix et de dormir sereinement. De plus, le critère économique s’interroge. La finition ultimate s’affiche à 42 600 €. Il convient de soustraire les 6 000 € de bonus écologique en 2021 et les 1 400 € de bonus marketing de remise pour un total final à 36 600 €. Soit 3 000 € supplémentaires en comparaison avec la version essence de 130 ch et boite auto 8 rapports. Donc le choix d’une Mokka 100 % électrique, pour accélérer et s’insérer, oui ! Pour s’amuser et virevolter, non !