Trip[tyque] nordique : la visite de l’usine Secma à Aniche (1/3)

by Novichok4 novembre 2023

Chez Secma, avant d’essayer/d’acheter leurs voitures, on peut visiter l’usine de production et ça en vaut le détour. Direction Aniche dans le Nord.

Le contexte de la visite

Quand il s’agit de Nord et de voitures atypiques, Thibault n’est jamais bien loin. Vous le connaissez bien sur Hoonited, c’est celui qui roule en 2CV Azam rouillée et qui aide les amis aux 24H2CV à Spa-Francorchamps. Dès lors, depuis l’été 2022, sa propagande régionale pour Secma est en marche.

En août 2023, Philippe, mon concurrent chez AutomotivPress mais néanmoins sympathique camarade, publie l’essai de la Secma F16 Turbo. Puis se dit qu’il serait pertinent et intéressant de prolonger l’expérience en visitant l’usine à Aniche avant de prendre le volant d’un Secma F16 et d’un Fun Buggy. Soucieux de l’environnement, il me propose de m’associer au projet avec un covoiturage jusque dans le Nord afin de partager cette belle journée (presque sans pluie) à Aniche. Fin octobre, nous voilà donc dans ma confortable Polo pour rencontrer l’équipe de ce constructeur automobile français de petites séries.

L’accueil à Aniche et l’incendie de 2009

Tels des fonctionnaires, nos horaires auront été définis avec une arrivée à 9h30 et un départ à 17h tapante. Au programme du matin, présentation de l’entreprise puis visite de l’usine avant d’essayer le F16 et le Fun Buggy durant tout l’après-midi. Dès à présent, je remercie chaleureusement Gérard Houdart, le responsable commercial de Secma, qui nous a permis d’échanger sur tous les sujets en ayant aussi un accès complet aux locaux.

Autour d’un café de bienvenue dans le showroom, Gérard nous présente la société pour laquelle il travaille depuis 16 ans. Entreprise qui a bien failli mourir en mai 2009 suite à un terrible incendie qui a ravagé quasiment tout le site de production. En cause, une malheureuse batterie au lithium défectueuse. De ce fait, 40 véhicules ont cramé. Entièrement. Pour autant, 39 futurs propriétaires ont refusé de se voir rembourser par Secma et ont attendu leur commande. Avec quelques mois de délais supplémentaires. Heureusement, le hangar stockant les carrosseries et une partie des bureaux ont été épargnés. De quoi se relancer après une bataille d’experts se rejetant tous la faute auprès des assurances.

Monsieur Renard, c’est Secma et réciproquement

Revenons au commencement, la marque Secma (Société d’Etudes et de Conception en Mécanique Automobile) a été créée par Daniel Renard en 1995. Après un CAP mécanique et une formation en dessin industriel et fonderie, celui-ci a débuté comme garagiste à Douai puis a construit son propre petit véhicule avant de lancer ERAD (Etudes Réalisation Automobiles du Douaisis) en 1974. Pionnier du sans permis en France, la diversification fut multiple avec des 3 roues, des utilitaires, des répliques de MG Midget et même des électriques.

Depuis bientôt 30 ans, Secma propose des véhicules de loisirs de faibles productions et depuis 2008, des voitures avec permis. Aujourd’hui, la gamme se compose de 4 versions : le F16, le Fun Buggy, le F16 Turbo et le F16 Turbo GT (version restylée de la phase 1). Toutes ces créations sont l’œuvre de Monsieur Renard. Oui, on dit bien Monsieur Renard car c’est le patron patriarche. Et pas de familiarités. Ce n’est pas le genre de la maison. Il faut imaginer un homme de 76 ans aux allures de Georges Hautecourt sortant d’une Mercer 35J Raceabout dans les Aristochats. Avec les mêmes lunettes aux verres épais sur le nez et non pas dans un rôle de notaire mais plutôt d’un prolétaire. Avec son bleu de travail, son carnet dans la poche et d’un pas toujours décidé, il multiplie les allées et venues dans chaque recoin de son entreprise et pourrait ajouter que « les ascenseurs sont pour les vieillards » si celle-ci n’était pas de plain-pied.

La polyvalence des petites entreprises

L’entreprise Secma se compose actuellement de 17 salariés, ce qui est peu pour produire 100 voitures par an. À ce sujet, ils recherchent des soudeurs. Ainsi que des monteurs. Mais surtout des soudeurs. Comme de nombreux métiers particulièrement qualifiés, le personnel se fait rare. Si vous êtes intéressés, venez de la part de Hoonited, ça nous fera plaisir.

La visite de l’usine de 8 500 m2 aura été pour moi une totale découverte. En toute liberté, on pouvait s’approcher des machines-outils qui ne riment pas vraiment avec modernité. Pour autant, les ouvriers s’assurent des cotes à chaque pièce produite ce qui règle la question d’un service qualité. On notera la polyvalence d’une majorité des employés, comme celle de Gérard qui passe de la vente, à la visite guidée ainsi qu’à la publicité du département du Nord (dont il est aussi originaire) et de ses plats typiques. Lors du déjeuner ensemble, poulet au Maroilles pour Philippe et carbonnade pour moi. Nous savons nous adapter à la gastronomie locale et respecter les traditions.

Un savoir-faire français

Une des grandes forces de Secma est évidemment sa réactivité et sa capacité d’adaptation. Sans oublier sa proximité. Demain, vous n’êtes pas content de votre F16, vous appelez et Monsieur Renard vous trouvera une solution. J’exagère à peine car personne ne se plaint de son F16 : « aucune panne, jamais ». De plus, un grand nombre de propriétaires viennent à Aniche pour une simple vidange ou la révision. En cas de chocs, les réparations pourront aussi se faire ici.

D’ailleurs, les acheteurs se rendent dans le Nord pour profiter d’une visite de l’usine avant de repartir avec leur nouveau jouet. À mon sens, c’est aussi ce qui plait à cette clientèle, l’authenticité et la simplicité de cette production française. Sûrement un monde anachronique en 2023. Ne comptez pas sur Monsieur Renard pour poster via Insta une photo ultra filtrée de lui sur le capot de son F16 Turbo GT ou pour réaliser une vidéo TikTok au volant d’un Fun Buggy. Il préférera venir le dimanche à l’usine pour bricoler un ULM ou préparer un prochain projet. Cependant, le site internet de ce petit constructeur n’a rien à envier aux grands généralistes tant il regorge d’informations claires et précises.

La construction d’une voiture Secma

Pour construire une voiture Secma, il faudra entre deux et trois mois. Aucun stock et tout se produit à la commande. Donc forcément, entre le Covid et la guerre en Ukraine, il n’a pas toujours été facile de répondre dans les délais mais la situation se stabilise dorénavant. On part donc d’un châssis-poutre réalisé sur place et intégrant le réservoir puis on ajoute les autres parties de la voiture avec les différentes pièces mécaniques et de carrosseries. Tournage, fraisage, usinage, thermoformage et soudage soudure permettent de visualiser les techniques utilisées pour arriver à ce résultat.

Les moteurs et les boîtes de vitesses proviennent de Renault (ou Peugeot pour la Turbo) et les freins d’une 307. Les contraintes réglementaires sont celles d’une homologation M1 pour les véhicules à moins de mille exemplaires annuels. On comprend rapidement la difficulté de faire de la petite série et de répondre aux nombreuses normes dont celles administratives. Pour autant, la stabilité financière de l’entreprise perdure avec notamment l’arrivée de nouveaux clients.

La clientèle Secma

La clientèle Secma se divise en 3 parties :

  • les fameux camping-caristes qui ont besoin d’un véhicule d’appoint pour se déplacer en ville ou sur les chemins,
  • les amoureux des balades dominicales,
  • les pistards.

Tout ce petit monde trouvera son bonheur chez Secma. Attention toutefois, on parle bien de véhicules spécifiques qui ne ressemblent pas à une voiture grand public. On s’adresse à des mecs en Caterham voire en Lotus. Ceux pour qui le plaisir de conduite ne rime pas avec assistance ou grand confort. Vous voyez une BMW Série 4 Coupé ou une Volvo XC90 ? Ce n’est pas ça avec Secma. Clairement, c’est un marché de niche mais qui va sûrement devenir un marché plus grand avec la fin des sportives abordables. On le verra dans nos deux essais par la suite mais à ce jour, aucune voiture ne propose des performances de ce niveau à ce tarif. Et surtout sans malus, ou presque. Pour la Turbo GT, comptez seulement 240 € et 1 200 € sur le Fun Buggy. Ridiculement bas en comparaison des GR Yaris, GR86 ou Civic Type R.

L’avenir de l’entreprise Secma

Chaque année, Secma organise un meeting sur le circuit de Clastres dans l’Ain. Le prochain aura lieu le 18 mai 2024. L’occasion de fédérer les possesseurs de sportives françaises et de rassembler tous les modèles. Avec 95 % de ses clients dans l’hexagone, on comprend qu’il s’agit d’un marché national. Reste à savoir comment Secma va s’inscrire dans le futur. Pour l’instant, ils vont au bout du thermique en proposant cette même gamme dans les prochaines années. Par la suite et avec l’électrification obligatoire, il faudra voir comment l’entreprise prend ce tournant. En attendant, avec Philippe, nous allons prendre des virages au volant d’un rigolo Fun Buggy et d’un sérieux F16. Cliquez sur les liens pour lire les essais !

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