(Petit) Essai du Renault Arkana : peu importe l’ivresse tant qu’on a le flacon
Renault Arkana E-Tech 145 (hybride non rechargeable)
31 200 € en motorisation E-Tech
39 050 €
Hybride non rechargeable composé d'un moteur thermique 4-cylindres 1.6 l de 93 ch associé à un alterno-démarreur d’une dizaine de kW, et d'un moteur électrique de 48 ch, le tout alimenté par une batterie de 1,2 kWh
Essence + électrique
145 canassons
148 Nm max
Automatique (lire le test pour le détail)
Traction
C'est long mais y a pire !
Haha !
Aucune idée
4 568 mm
1 821 mm
1 571 mm
2 720 mm
1 435 kg (donc loin des fameuses 2 tonnes qu'on entend partout)
50 litres
100 bornes max
5.9 l / 100 km
108 - 116 gramme de CO2 par kilomètre
5 CV
Un magicien trompe le public en faisant diversion, en montrant une chose pour en faire une autre. C’est exactement ce que fait le Renault Arkana. Et « arcanes » désigne le secret qui se cache derrière un tour de magie. Coïncidence ? Spoiler : NON !
Contraste !
« Contraste », c’est le terme que j’avais entendu 142 fois lors d’un long cours de 6 heures sur le design des châteaux d’eau (véridique). Le contraste est à l’originalité ce qu’est l’eau à la vie, Lada à @Vityok ou un ticket resto à un stagiaire. Vous manquez d’inspiration ? Prenez deux choses que tout oppose et associez-les. Au pif, les formes organiques des corps de femmes nues et celles angulaires du monde géométrique pour obtenir les Demoiselles d’Avignon. De l’ananas et une pizza pour créer la Hawaïenne. L’habitabilité minimale d’un coupé à l’encombrement maximal d’un SUV pour créer le BMW X6.
Et ça plaît, car le cœur a ses raisons que la rationalité (pote de la raison) ignore ! Pour preuve, Mercedes a décliné toute sa gamme sous cette variante, BMW en a fait une famille et pour la première fois, un constructeur généraliste sort un modèle du genre, ce fameux Renault Arkana, qui est l’archétype thème de la notion de contraste.
Un cœur de velours dans un écrin d’enfer
Le design tranche les avis. Je fais partie de ceux qui aiment vraiment la ligne, comme j’aime celle du X6. Le premier contact est d’ailleurs une fracture de l’œil droit, surtout en orange avec ses jantes noires. Mais ce sera de courte durée. La fracture se résorbe aussi vite que l’identité visuelle marquée ressort. Le hic, c’est que du Renault, on en voit partout. L’Arkana reprend l’identité de la Megane 4, donc de la Clio 5, donc du Captur, donc de la Talisman (oui LA Talisman comme LA GameBoy)… Logique puisque cet Arkana existe en réalité depuis déjà 2 ans en Corée du Sud et en Russie.
A la surprise succède donc une petite lassitude. La ligne est également plus sage que celle du X6, moins radicale à cause d’un pavillon moins plongeant permettant d’éviter la guillotine aux passagers arrières. Comme quoi l’histoire est utile, même pour les designers.
Le prix du Renault Arkana
Affiché entre 30 et 36 k €, le Renault Arkana n’est « pas cher » pour un véhicule hybride. En face, avec cette techno, on trouve au mieux un CHR, plus petit, avec moitié moins d’options (pas d’accoudoir central arrière, pas de toit ouvrant, pas d’aération à l’arrière, une interface multimédia datée et une boîte à gants en guise de coffre). A ce tarif, sur ce segment, faut faire des concessions sinon c’est l’échec. En gros, la clientèle a moins d’oseille mais veut le beurre et l’argent du Uber beurre. D’où le design moins radical donc plus polyvalent de l’Arkana par rapport au X6.
Pour maintenir ce prix tout en augmentant la qualité perçue, Renault a appliqué la technique de Peugeot : investir dans les éléments touchés par les utilisateurs et lever le pied (haha) sur les choses plus cachées (étriers, certains boutons, suspension, pneus). Ce n’est pas un mal mais cette idée est à l’opposé de l’approche japonaise comme celle de Suzuki par exemple.
145 chevaux au pas mais pas celui de course
L’Arkana souffre du syndrome Mazda 3 : une gueule ultra agressive, des artifices à avaler le bitume comme mon chien enfile les chipos à un barbecue et au bout, tel mon chien face à une salade, RIEN.
Ça dissone fortement. L’engin n’est pas lourd, avec un poids 100 kg plus élevé que celui d’un Ateca à motorisation équivalente, l’hybridation en moins. Le moteur électrique permet des démarrages plutôt vifs, mais ça s’arrête là. La voiture monte gentiment en puissance. Votre cœur vous motive à taper dedans, celui de l’Arkana n’en aura pas envie et hurlera de douleur pour vous le faire comprendre.
Au volant de l’Arkana
Au volant de l’Arkana, il ne se passe rien et l’insonorisation réussie associée à un son Bose (dont la qualité est plutôt discutable) troquent le fun pour la sérénité.
C’est donc LA voiture idéale des personnes qui veulent rouler pépères dans une gueule d’enfer. CONTRASTE on a dit !
Cela dit, enquiller les bornes au volant de l’Arkana avec les aides activées (régulateur adaptatifs, aide au maintient dans la voie, vous connaissez la chanson) procure une sensation de calme et de bien être avec une pointe de frustration. C’est ce qu’on demande à une familiale aujourd’hui, mais ce qui a dérangé @Novichok dans son essai du Captur et ce qui m’a un peu frustré. Cela dit, nous ne sommes pas la cible de ce véhicule. Puis pour claquer des chronos, il reste toujours la Megane 4 RS.
E-Tech : c’est dans les vieux moulins qu’on fait les meilleurs couples
Je parle rarement de détails techniques car ça m’expose à la geekosphère de la bagnole alors que je n’y connais « stagiairement » rien. Mais je fais une exception car ça s’impose. La technologie E-tech est, pour faire simple, un bloc mêlant un moteur thermique, un moteur électrique et un alterno-démarreur, le tout piloté par une boîte à crabots.
« Crabot » ne vous dit rien ? Normal, le nom est chelou mais c’est encore utilisé aujourd’hui en compétition. Pour faire simple, on va synchroniser les passages de rapports (des engrenages) via les crabots (dont les dentures ont une forme différente de celles des engrenages classiques) et non des synchros.
L’avantage, c’est qu’on y gagne en volume et en poids ; on peut se la péter à jouer du double débrayage comme Mark Sinclair Vincent Vin Diesel (mais lui le fait sur une boîte auto, c’est conceptuel). L’inconvénient étant des passages un peu brutaux, comme ce vieux tonton Freddy dont la légèreté du pied n’a d’égale que la finesse d’une blague de Bigard. Ici, la synchro est aidée par l’alterno-démarreur qui se charge de faire aussi plein d’autres trucs comme gérer la transition électrique/thermique avec la douceur d’un thé à la menthe, recharger la batterie lors des phases de décélération, aider le moteur thermique dans les moments de déprime difficile. L’autre moteur c’est un peu le big boss, il n’en fout pas une mais il fait avancer la baraque.
Un tour de passe-passe
Renault a presque réussi un tour de passe-passe remarquable puisqu’avec 4 rapports sur un vieux bloc essence aidé par deux moteurs électriques, l’ensemble offre un agrément proche d’une boîte à double embrayage. Presque, car même la plus compétente des princesses ne saurait transformer un « crabot » en DSG.
Et si les premiers retours font éco d’à-coup au niveau des passages, perso je n’ai ressenti de tel (sinon ça m’aurait réveillé).
Point perso qui n’engage que moi (et un peu la rédaction) : pour afficher des caisses moins indécentes niveau tarifs (pour rappel on oscille entre 35 et 40 k € pour du généraliste), Renault a utilisé un vieux moulin. Comme Volkswagen qui utilise son ancien 1.4 TSI et sa vieille DSG6 plutôt que le nouveau bloc 1.5 et la DSG 7 (mais affiche, elle, entre 40 et 50 k€ sur la facture).
Renault Arkana : un véhicule malin
L’Arkana est malin sur plusieurs points. Déjà parce qu’il ne reproduit pas les erreurs du X6 : les sièges arrières sont par exemple un peu plus inclinés que la normale, 28° non Celsius. A quoi ça sert ? A gagner en espace au niveau de la tête, car la diagonale d’un carré est plus longue que son côté (niveau collège genre 5ème B).
La ligne de toit est moins fuyante également, de quoi permettre à un Vityok de tenir dedans (enfin, il sera limite en hauteur quand-même). Je n’ai pas pu réaliser le test du siège auto mais ça passe large.
L’intérieur du Renault Arkana
Dans les jeux vidéo, on peut distribuer des points de compétences en nombre limité. Pour les voitures, c’est pareil, mais avec de l’oseille. Donc vous avez une enveloppe et vous devez faire des choix. Renault veut monter en gamme. Alors l’idée est simple : prendre tous les éléments en contact avec les conducteurs et y mettre les ronds pour augmenter la qualité perçue. On a donc droit à un volant hyper quali, des sièges confortables adaptés aux personnes larges (comme le stagiaire), un compteur entièrement numérique et une tablette à l’affichage très fin et l’interface réussie.
En contrepartie, d’autres éléments ont été délaissés. Par exemple, la qualité d’image de la caméra de recul. Même si on ne se fera pas une toile avec, elle est quand-même limite en basse luminosité. Pour la clim et la mise en route, on reprend les boutons de la Sandero (que j’apprécie particulièrement d’ailleurs).
De la qualité au toucher
Bref, ça donne l’air d’un truc quali, ça en a le toucher. Mais il y a des détails qui sonnent un peu faux, comme cette mousse étrange sur le tableau de bord dont le but est d’insonoriser la voiture certes, mais qui fait cheap au possible.
Enfin, malgré la présence d’écrans à gogo et de tactile ; Renault à eu l’idée de garder les boutons pour un usage à l’aveugle. Enfin presque, car ceux sous la tablette sont très proches, trop proches même.
Une conduite apaisée dans un look vénère
Globalement, conduire l’Arkana est agréable et plaira à la cible de cette voiture : des proprios de voitures ayant minimum 10 piges, aux consommables usée jusqu’à l’écrou, puant le mazout, à l’insonorisation digne d’un T-14 et pour qui la dernière révolution était l’ABS. Dès lors, l’Arkana, c’est le Nautilus et je ne parle pas du concept car Peugeot.
Un cockpit d’avion
Alors vous imaginez qu’en arrivant là-dedans, c’était le turfu. Mais un turfu rationnel. Le design de Renault n’a plus ce côté suffisant (et moche) qui se prend pour ce qu’il n’est pas. On se sent plutôt dans un cocon que dans le salon façon art déco vulgaire. Prendre le volant à la finition très réussie met alors directement en condition.
Au démarrage, silence, on roule. Normal, Renault a insisté pour que ce soit toujours l’électrique qui ouvre la marche. Sachant que passer d’un état immobile à un état mobile est ce qui demande le plus d’effort et que le moteur électrique offre 100 % de son couple à tout instant. Cette idée inspirée de la Prius prend tout son sens.
Une étrange direction en Renault Arkana
La direction est étrange : plus on tourne le volant, plus on a l’impression de lutter contre un élastique. C’est désagréable alors que niveau assistance variable, je ne suis pas contrariant. Puis je la trouve un peu floue, notamment au niveau de l’angle lors de la prise de virage.
Qui dit hybride dit deux modes drive : le standard appelé « D » (qu’on peut appeler Ryan) et le système qui optimise la récupération d’énergie appelé « B » (ou Gosling). Pour ce dernier, je vous renvoie encore une fois au test du Captur car j’ai le même ressenti que je peux décrire ainsi : c’est comme tenter de rouler vite à vélo avec des pneus presque à plat. Dès qu’on arrête l’effort, ça freine vénère. Bon point pour l’usage hybride et la durée de vie des disques et plaquettes de freins, mais à réserver à des situations spécifiques.
Niveau suspension, ça oscille énormément dès qu’on prend un dos d’âne ou qu’on se farcie des routes endommagées, une vilaine habitude des SUV accentuée ici. Dommage car les pneus taille haute et pas trop large gomment bien les nids de poules, coqs et autres volatiles, et le châssis est réussi.
Le système multimédia
Enfin, le système multimédia a une interface jolie et Android Auto sur mon téléphone moisi n’a pas planté (un exploit). L’agencement vertical permet d’avoir sur un même écran vos derniers appels, la playlist qui tourne et la carte GPS. C’est moins intuitif que chez VAG mais c’est plus joli et pratique. Notez que les mises à jour du système se font Over The Air (ou si vous préférez automatiquement via une connexion). Soigner le système d’info divertissement pour rompre l’ennui au volant, c’est malin !
Consommation : itinéraire d’un parcours biaisé
Merci Renault pour cette essai, vraiment. Par contre, le parcours programmé composé de zones à 70 km/h entrecoupées de villes soit 30 km/h (oui c’est 30 km/h en ville) n’est pas super « fairplay » comme le disent les joueurs de Wreckfest. Un itinéraire qui a fait baisser la conso moyenne affichée de 6.4 l /100 km à 5.9 l / 100 km (avec la clim pleine balle). A titre de comparaison, mon Ateca 1.5 TSI non hybride de 150 ch sur un trajet similaire descend à 5.7 l / 100 km clim activée (et même à 5.2 l / 100 sans).
On en arrive à la moral de cet essai : l’hybride, c’est cool. Mais ça ne fait vraiment la différence que dans les situations quasiment statiques, soit dans les bouchons ou sur des parcours avec beaucoup d’arrêts comme la ville. Pas forcément des lieux adaptés au plaisir de conduire.
Un magicien qui fait plus qu’illusion
L’Arkana est un chausson de velours dans une basket de fer. Il a plein de petites choses pas follichones mais aucun « dealbreaker ». Surtout qu’en face, il n’y a pas grand chose. Le Toyota CHR a un agrément moindre et un espace arrière déconseillé aux claustrophobes. Et… C’est tout !
Sur ce segment, pour 39 000 € tout équipé (sans compter la remise), il offre LA MEILLEURE solution familiale cool avec un look agressif… pour qui veut une hybride.
Parce qu’en face, le TCE 140 offre une boîte à double embrayage à 7 rapports (une vraie), 260 Nm de couple, 100 kg de moins sur la balance (la version hybride se farcie l’équivalent d’un stagiaire dans le coffre H24 et le stagiaire a horreur de ça), un surplus de 1 l pour 100 km pour 2 000 € de moins.
Sur une LOA avec 45 000 km autorisés sur 3 ans, pour un surplus de 3 litres pour 100 km à 1.6 € le litre d’essence, ça fait 1 350 litres de plus (et j’ai pris une consommation 3 fois supérieure) soit 2 160 €.
Peut-être que niveau écologie ça se tient (ça évite surtout d’enfumer les piétons en ville), mais niveau finances, pas vraiment et niveau agrément de conduite ça dépend du conducteur.
La conclusion
Toutefois, réussir à lier ligne agressive, approche cohérente, ergonomie, confort et douceur, tout en se pliant à une cible particulièrement large et des lois aussi absurdes que contraignantes, est un joli pari habilement relevé par Renault.
+ Look vraiment sympa
+ Habitabilité très correcte
+ Confort à bord
+ Tout le monde peut le conduire (jeune, vieux, gens sympa, gros boulets)
+ Confort des sièges (surtout au niveau des lombaires pour les personnes ayant des problèmes de dos)
+ Volume de coffre
+ Consommation contenue
- Suspensions trop souples
- Pas de caméra à 360° disponible pour le moment
- Pas si intéressant, financièrement parlant, face à la version TCE 140
- Sensation inexistantes
- Système hybride nouveau dont la fiabilité n'est pas encore connue